Le retour à la nature par l’Homme organisée

Alors que je vis depuis plusieurs mois dans la capitale économique de l’Australie, enchaînant les semaines de labeur en vue de reconstituer un pécule suffisant pour continuer mon périple, j’ai profité de quelques jours de désœuvrement pour arpenter les alentours de cette ville tentaculaire.

Heureuse planification urbaine, les transports en commun de la ville sont particulièrement adaptés à l’escapade improvisée dans l’entourage boisé. Une heure de trajet depuis la gare centrale suffit à se retrouver perdu qui dans une vallée encaissée, qui à déambuler dans une jungle sèche littorale.

Aussi, ai-je échangé mes chaussures de sécurité d’acier renforcées pour mes chaussures de marche depuis trop longtemps remisées. Quelques sandwichs, de l’eau en quantité, un appareil photo chargé à bloc, un réveil matinal et me voici de nouveau sur les sentiers.

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Katoomba, la porte d’entrée des Blue Mountains

Ma première étape est un site emblématique des alentours de Sydney, à près d’une heure et demi de train cheminant tel un sénateur jusqu’à Katoomba. Autrement dit, me voici aux Blue Mountains, ainsi dénommées au regard de l’azur du ciel qu’aucun nuage ne vient troubler.

Pour cette remise en jambes, je profite de l’occasion pour faire découvrir à mon amie les joies de la marche dans la nature. Citadine de naissance, c’est une activité à laquelle elle était parfaitement étrangère.

Après une courte marche traversant la petite ville, nous voilà au belvédère aménagé au sommet de la falaise. La vue est saisissante sous le soleil du matin. Les ocres de la roche se disputent au vert profond de la vallée et au bleu royal d’un ciel immaculé. La journée s’annonce chaude et pleine de promesses. En contrebas, une vue parfaite nous est offerte sur les Three Sisters, trois pics écorchés, parsemés de plantes sèches. Meehni, Wimlah et Gunnedoo, de la plus grande à la plus petite,  seraient trois sœurs unies dans la roche.

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Les Three Sisters sont en bas à gauche, à droite c’est le grand barbu

Souhaitant se marier à trois hommes d’une tribu rivale, elle furent transformées en pierre par un chamane pour les protéger d’une guerre. Ce dernier, mort dans le conflit, emportera le secret de la délivrance des trois soeurs dans sa tombe. Depuis elles demeurent, sentinelles de grès, à flanc de falaise.

Point de mythologie aborigène pour autant, uniquement l’imagination presque centenaire de l’office de tourisme local voulant donner plus de cachet au lieu.

Nous nous engageons vers le chemin qui nous mènera jusqu’à la vallée. De chemin, nous sommes plutôt sur une allée bétonnée, aménagée, organisée. Bancs, barrières, belvédères, tout est fait pour le confort du promeneur.

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Contemplation

L’effort survient au détour d’un escalier menant jusqu’au pied de Meehni puis se poursuivant jusque dans la vallée. 900 marches taillées dans le roc ou boulonnées à la falaise. Opportunément appelé Giant Stairway, il prélève son tribut que ce soit à la montée ou à la descente. Son étroitesse nous impose des arrêts successifs pour laisser monter un groupe d’adolescents partis dans la forêt depuis plusieurs jours. Lourdement chargés, ahanant sous l’effort continu, le visage rouge, ils poursuivent leur ascension déterminés.

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Giant Stairway

Enfin, au pied de cet escalier digne de celui du col de Cirith Ungol, nous débouchons dans la vallée, sous le couvert bienvenu d’une végétation florissante. Choisissant de faire le grand tour, nous reprenons la marche, sur un sentier sans difficulté. S’il est de terre, il ne manque pas d’aménagements nombreux. Plate-formes, marches, barrières. Là encore, le confort du marcheur est prioritaire sur l’authenticité. Pourtant petits ruisseaux, lézards et oiseaux-lyres font vivre la forêt alors que le vent fait bruisser la canopée. Je me retrouve dans la nature et je m’y plaît !

Traversant une aire de pique nique suraménagée, nous devons attaquer la remontée de la falaise en suivant un escalier qui serpente de part et d’autre d’un miniscule ruisseau. L’ascension ne demeure pas moins délicate pour les mollets et les cuisses habituées au maniement de la pelle et du marteau piqueur.

Au sommet, une nouvelle piste amménagée nous ramène peu à peu vers notre point de départ. Parsémée de belvédères, nous profitons de l’un d’eux pour casser une graine, chasser un corbeau trop audacieux à l’aide d’une gourde, récupérer le facétieux récipient qui a décidé d’aller se nicher dans des racines 20 mètres en contrebas dans la pente.

De retour à Echo Point, surplombant les Three Sisters, nous retrouvons la foule que nous avions pu éviter toute la journée. Quelques dernières photographies, une pinte revigorante et nous reprenons le chemin de nos pénates.

Quelques jours après, nous décidons d’aller admirer le coucher de soleil sur Opéra House, le fameux opéra de Sydney, et son voisin le Harbour Bridge depuis les ferrys qui traversent la baie. Un retard conséquent à l’allumage nous impose une solution de rechange qui nous permet, au terme d’une courte balade, de profiter d’un coucher de soleil de qualité sur la ville depuis les contreforts du zoo.

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Coucher de soleil sur Harbour Bridge et Opera House

Ayant regoûté aux joies de la marche, je me sens insatiable et je pars seul vers le Sud de la ville et le Royal National Park. Je pars en quête d’une formation rocheuse cotière d’intérêt. Le figure 8 pool, autrement dit le bassin du chiffre 8.

Une fois de plus, c’est le train qui me dépose à Otford, gare perdue dans une vallée encaissée. Des marches, une montée bien pentue et me voilà au sommet d’une falaise. A croire que sorti de Sydney, tout n’est fait que de marches et de falaises.

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De la falaise, en veux-tu, en voilà !

Il me faut traverser une route cotière, que les Australiens apprécient tant. Pourquoi marcher lorsque l’on peut conduire. La côte est sillonnée de ces chemins douaniers asphaltés pour le plus grand plaisir des marcheurs motorisés.

Je m’engage néanmoins dans la forêt d’eucalyptus que je dois traverser pour atteindre mon objectif. La matinée est à peine engagée que la chaleur est déjà étouffante. Je regrette de ne pas avoir emmené plus d’eau et décide donc de me rationner.

Fort heureusement, la première partie du sentier est bien moins aménagée qu’aux Blue Mountains. Je retrouve les sensations de la randonnée qui me manquaient tant. De rochers en surplombs en combes recouvertes de végétation, je progresse jusqu’à déboucher sur une plaine recouverte de hautes herbes. Sous un soleil de plomb, je progresse d’un bon pas sur une sorte de ponton de plastique servant de sentier. Je débouche sur une plage, traverse rochers et éboulis jusqu’à atteindre l’étendue plane où se trouvent la fameuse 8 pool.

Je m’attendais à quelque chose de clairement visible, je dois m’allier avec d’autres personnes pour la trouver. Bassin de 3 m de long pour 1,20 de large au maximum, l’endroit n’est guère impressionnant par sa taille mais par la régularité de son exécution.

 

Certains s’y baignent, d’autres font des selfies alors que je me restaure avant de reprendre la marche. Le retour, par un autre chemin, est aisé bien que mes reserves d’eau soient au plus bas. J’accélère le rythme sur le dernier kilomètre pour ne pas rater le train du retour qui me ramène à un repos bien mérité et quelques bières revigorantes (pour les sels minéraux).

Alors que mon sac avait été conscieusement préparé à l’avance, j’ai oublié mon appareil photo en partant au petit matin. Qu’à cela ne tienne, je décide d’y retourner. Je convainc Martin, un Français rencontré un an plus tôt en Indonésie, de joindre mon entreprise et c’est en duo que je retourne sur mes pas pour une journée de marche d’excellente facture, ensoleillée mais pas trop chaude. En bonus, nous avons l’heureuse surprise d’entrapercevoir un petit cétacé qui ne manque pas de nous saluer de sa nageoire caudale, un wallaby, et un océan remuant juste ce qu’il faut pour agrémenter le paysage.

 

Je ne manquerai pas de mettre à profit le mois qu’il me reste en Australie pour continuer à découvir les alentours de Sydney et m’entrainer pour le Népal.

Pour plus d’images des Blue Mountains et du Royal National Park, c’est par là : Autour de Sydney

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